Chaussette, Carotte et Pissenlit.
LA PETITE CHAUSSETTE
Ce matin des mains douces et expertes
aux pieds de bébé ont mis deux chaussettes.
Pointure dix huit ou bien dix sept,
qu'importe ! Point besoin de sandalettes,
bébé ne tient pas encore sur ses jambes rondelettes !
Sa balade, il la fera en poussette.
Il gazouille. Au ciel fait des risettes,
agite ses menottes et ses petites gambettes !
Mis en joie par le chant d'une poulette
bébé frictionne ses petits petons, mouli- moulinette,
expulsant l'une des chaussettes
qui atterrit, ô la pauvrette,
paf sur le bitume, ouille sur sa margoulette...
Estourbie, elle se sent toute blette.
François qui passait par là, sans bicyclette,
trouva que la sympathique binette
de cette orpheline petite chaussette
méritait d'être immortalisée,
par un joli cliché.
LA JEUNE CAROTTE
Au marché, Carotte et Banane, voisines d'étal potinent.
- Vise Persil Frisé, il est tout raplapla !
- Son coiffeur confine. Chicorée, elle aussi, aurait bien besoin d'une séance de bigoudis !
- J'envie ton teint magnifique, ma belle Carotte, alors que le mien est si jaunâtre...
- Ça, c'est le foie ou bien la vésicule. Mange de l'artichaut. En revanche, tu as une ligne superbe.
- Confidence de Banane : je suis accro au régime !
- Moi, j'en ai marre d'être aussi replète, de faire exploser la balance...
- Pour alléger la pesée, coupe tes fanes; tu plairas toujours autant à tes fans qui rêvent de tes rondeurs en vichy ou sauce bécha...m... melle... Eh, là ! On m'entraîne... on me jette au fond d'un cabas, pouah, des poireaux psycho-rigides y puent des pieds. Je vais me pincer le nez et me laisser entraîner vers ma destinée de flambée - caramélisée, histoire de copier tes belles couleurs. Salut ma jolie Carotte !
- Adieu jolie Banane ! crie Carotte en se dépiautant de sa chevelure verte. Je suis LIBRE ! LIBRE et LÉGÈRE ! Je vais être bientôt MINCE et FINE, rit-elle en sautant sur le macadam.
Un colossal engin de métal s'éloigne; cet indifférent ignore que ses monstrueux pneus viennent de réaliser le souhait minceur d'une jolie carotte.
Marie va immortaliser cette plante potagère, pas plus épaisse que papier de cigarettière.
ET LE PISSENLIT
Se riant du confinement
de longues chenilles vertes ondulent inexorablement
vers le pissenlit qui étale, dérisoire bouclier emprunté au lion, les crans de ses larges dents.