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Défi n° 255 proposé par Martine - Quai des Rimes

Publié le par François & Marie

 

Décrivez un de vos défauts ou atouts physiques ou de personnalité en utilisant

le plus possible d’adjectifs en gras dans l’extrait de la tirade du nez

de Cyrano de Bergerac ci-dessous.

Vous pouvez aussi utiliser d’autres adjectifs.

Amusez-vous, Amusez-nous !

 

Extrait de la tirade du nez de Cyrano de Bergerac :

Agressif: Moi, Monsieur, si j’avais un tel nez,
Il faudrait sur-le-champ que je me l’amputasse !
Amical: Mais il doit tremper dans votre tasse !
Pour boire, faites-vous fabriquer un hanap!
Descriptif:  C’est un roc ! . .. c’est un pic ! . . . c’est un cap !
Que dis-je, c’est un cap ?. .. C’est une péninsule !
Curieux:  De quoi sert cette oblongue capsule ?
D’écritoire, Monsieur, ou de boite à ciseaux ?
Gracieux:  Aimez-vous à ce point les oiseaux
Que paternellement vous vous préoccupâtes
De tendre ce perchoir à leurs petites pattes ?
Truculent:  Ça, Monsieur, lorsque vous pétunez,
La vapeur du tabac vous sort-elle du nez
Sans qu’un voisin ne crie au feu de cheminée ?
Prévenant:  Gardez-vous, votre tête entrainée
Par ce poids, de tomber en avant sur le sol !
Tendre:  Faites-lui faire un petit parasol
De peur que sa couleur au soleil ne se fane !
Pédant: L’animal seul, Monsieur, qu’Aristophane

Appelle Hippocampelephantocamelos
Dut avoir sous le front tant de chair sur tant d’os !
Cavalier:  Quoi, l’ami, ce croc est à la mode ?
Pour pendre son chapeau, c’est vraiment très commode!
Emphatique: Aucun vent ne peut, nez magistral,
T’enrhumer tout entier, excepté le mistral !
Dramatique :  C’est la Mer Rouge quand il saigne !
Admiratif:  Pour un parfumeur, quelle enseigne !
Lyrique:  Est-ce une conque, êtes-vous un triton ?
Naïf:  Ce monument, quand le visite-t-on ?
Respectueux: Souffrez, Monsieur, qu’on vous salue,
C’est là ce qui s’appelle avoir pignon sur rue!
Campagnard:  He, ardé ! C’est-y un nez ? Nanain !
C’est queuqu’navet géant ou ben queuqu’melon nain !
Militaire:  Pointez contre cavalerie !
Pratique:  Voulez-vous le mettre en loterie ?
Assurément, Monsieur, ce sera le gros lot !

Enfin parodiant Pyrame en un sanglot :
« Le voilà donc ce nez qui des traits de son maître
A détruit l’harmonie ! Il en rougit, le traître ! »

Cher locuteur.
D'entrée, sachez que mes propos ne se veulent nullement agressifs.
Pourtant, n'est-ce point vous montrer un tantinet curieux, juste un brin cavalier, voire, quasiment à la limite de l'indiscrétion, lors que vous sollicitez autrui d'une auto-description ?


Dans cette affaire, vous semblez vous être réservé le beau rôle.
En une courte phrase vous proposez " Décrivez un de vos défauts, ou atout physique ". Point final. Alors que le destinataire, lui, doit développer et se dévoiler...

Pourtant la réalité n'est pas aussi simple qu'il y paraît, "... nous l'allons montrer tout à l'heure", comme dirait Jean de La Fontaine.
Au début, vous êtes le loup, ils sont les agneaux.

Cher locuteur, quand faut y aller, faut y aller ! Êtes vous prêt ?

Vous posez vos lunettes sévères sur votre nez et la question dans la foulée.
Vous voilà satisfait de vous-même – vous n'avez pas bégayé - prêt à écouter, vous vous abandonnez au dossier de votre fauteuil mimosa (salissant, certes. Soldé 50 % chez Ingvar, le Suédois.)

Imaginez que l'autre vous réponde sur le champ en larges envolées, moulinant du vent et vous noyant sous moult(s) descriptifs.
Vous qui pensiez planer en indolente torpeur, vous êtes électrisé par cette girouette éolienne.
Pas simple de discerner le vrai du faux chez cet allocutaire.
Au mieux, le classeriez-vous en emphatique spontané ? Au pire, le ramèneriez-vous au niveau des pédants ? (en imaginant que vous soyez un peu jaloux de sa culture du "Connais-toi Toi-même.)

Expectatif, vous repoussez vivement mimosa, jetez vos binocles et courez prendre l'air, exempt de vent.
Pas si facile que ça de devoir trancher.

Le lendemain vous trouve requinqué et confiant.
Vous allez vite déchanter.
Face à vous un personnage qui, d'entrée, semble mener le jeu.
Il exige de rester debout, aussi raide et inexpressif que la momie de Ramsès II.
Menton pointé, il fixe un point au-delà de mimosa (rhume des foins chronique ?)
Impassible, il attend que vous parliez.
D'une voix de fausset vous énoncez l'exposé.
D'un déclic Ramsès enclenche son lobe occipital.
Ses réponses vous mitraillent, brèves, sèches, ton monocorde scandé de “Monsieur” hachés et tranchants, faute d'être respectueux.
De profil, on perçoit le recroquevillement de votre lobe temporal qui a juste eu le temps de vous remémorer: les militaires sont tenus au devoir de réserve.
Bombardé par tous ces mots incisifs vous manquez d'air.
Vous tressaillez. Vous tressautez. Vous tressaillez encore. Vous tressautez toujours.
Entre deux spasmes vous bredouillez " À l'aide... je convulse..."
Pff, vous avez simplement le hoquet. Pauvre poule mouillée !

Cher locuteur, suite à cet épisode, vous êtes las du dramatique.
Vous vous rêvez en tendre bonbon anglais, vous fondez en un décor douillet de tapis épais...
Des fauteuils moelleux et dodus vous enfouissent. De précieuses tentures vous emmitouflent.
Vous humez les fragrances des roses-thé et du thé à la rose servi par une gracieuse et prévenante camériste.
L'hôtesse du lieu, élégante douairière, vous charme en mode Soprano lyrique et vous touche à l'âme.
Aucune parole n'a été échangée.Vous êtes subjugué, admiratif.


Requinqué par ce Nirvana, c'est avec le sourire que ce matin vous accueillez un campagnard aussi rougeaud que truculent.

Il parle fort, fait des remarques sur tout, " Mazette ! çan, y'en est' ti du bin brave n'escayïer... Du travaux d'avant guérre, çan, recta..."
Il vous a à la bonne, vous donne d'amicales claques dans le dos " Bin mon gars, i fâît piaisi de r'trouver un pays dans c'ta grand'ville !"
Ce naïf s'étonne de tout " Vôs clairez mém' le je ! i dait coûter bonbon, vieux, tout çan ..."
Son esprit pratique est sans cesse en éveil - il est toujours prêt à rendre service - "P'tiot gars ç'ta chés' êst bin bancalouse...T'vas cheudre à pe te déniaper l'coq six, recta... Bouge point ! j'm'en va t'la r'vissi. Nam d'in ptiot bonhoumme, j'a touj' man tren'visse dins ma pouch' ! N'y v'là, i'est fâît, recta !"

- Celui-ci, cher locuteur, ne vous a pas donné beaucoup de mal, il était transparent comme eau de roche !
- Et vous ?
- Quoi, moi ?
- Vous deviez vous décrire...
- Je l'ai fait, cher locuteur ! Vous qui ne manquez pas de psychologie, vous retrouverez facilement un peu de moi en chacun des personnages évoqués... Cherchez un peu. Pour une fois c'est à vous de faire fonctionner votre matière grise !



 

 

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Défi n° 254 proposé par Jeanne FaDoSi pour Les Croqueurs de Mots

Publié le par François & Marie

Jeanne nous dit :
"Essayons de faire abstraction du vécu de ces deux dernières années pour écrire un texte de quelques lignes en prose ou en vers (libres ou pas) dans lequel nous nous projetons dans cet avenir proche. Rêvons un peu, beaucoup, passionnément !"

...................................................................................................................................

Armand est un vieux monsieur qui a franchi avec enthousiasme le seuil de la nonantaine.
Lorsqu'il décida de vivre sa retraite dans la maison familiale, les gens du bourg murmurèrent, mi-figue, mi raisin,
- "L'original" est revenu.
"L'original" est une formule neutre et prudente utilisée par ses congénères, qui l'ont souvent considéré en décalage vis-à-vis d'eux.
Si d'aventure l'un d'eux croisait Monsieur Armand dans ses périodes "fantaisistes"- chaussures dépareillées, rubans colorés noués à son grand feutre noir, soliloquant avec sauterelles et pâquerettes – il aurait été tenté de majorer “original” en toc toc brindezingue et personne ne l'en aurait blâmé !
Pourtant, aucun n'a jamais franchi cette limite ;
in extremis on se souvenait que ce personnage "travaillait aux impôts". C'est suffisamment flou pour troubler et assez clair pour en imposer (sic !)
Monsieur Armand possède une autre particularité. Contrairement à ses semblables vieillissants qui s'agrippent à leur mémoire ancienne, lui, gomme sciemment le passé. Il le considère comme un vécu périmé encombrant ; il le vire sans aucun scrupule.
Puisqu'on lui a souvent assuré que la nature a horreur du vide, Monsieur Armand pressent que les petits tiroirs de son cerveau n'attendent qu'une chose : être à nouveau remplis.
Mais, par quoi ?
Depuis peu l'esprit de Monsieur Armand est en brouillamini. Il subodore qu'il s'y trame des étrangetés, comme qui dirait, des bizarreries...
Nullement inquiet, plutôt excité, il pressent que les petites cases vides sont en train de se combler à nouveau.
Peu à peu, il perçoit des informations qui le surprennent. Des détails concernant le futur.
Puis, Monsieur Armand n'a plus de doutes, il sait qu'il sait de quoi demain sera fait.
Le voilà face à un dilemme : s'il dévoile abruptement cette nouvelle singularité, on va le juger ramollo du ciboulot et, s'il se tait, il va faillir au devoir de donner un coup de pouce à ceux qui en auraient besoin.
Il décide d'informer son entourage, par petites touches, sans les effaroucher ni les alarmer.
Monsieur Armand est comme un volcan qui voudrait exploser et qui ne peut se permettre qu'un discret pet de coucou.
Tourneboulé, il réfléchit longuement, assis à l'entrée du jardin public où il attend son arrière petite fille.
Il dévisse le pommeau de sa canne et en extrait précautionneusement une petite flûte.
Il se met à en jouer doucement les yeux clos. Manière efficace de renouer avec la sérénité.
Les oiseaux et les grillons font silence. Un long temps.
Peu à peu cesse la musique de Monsieur Armand qui conserve les yeux clos.
Face à lui, tout doucement, une voix joyeuse fait écho à la vibration de ses flûtis.
- Salut pépé !
- Oh ! Tu es là ma Criquette ! Bonjour ma sauterelle préférée !
- Tu es prêt pour le tour du parc à pas de géant ? Tu te souviens, on a commencé ce rituel alors que j'avais un peu plus de deux ans ! On riait comme des bossus, moi qui trottinais et toi qui chaussais des bottes de sept lieues !
- Les temps changent, c'est toi maintenant qui feras les plus grands pas. Profitons-en, dans quelques semaines les allées seront fermées.
- Ah ! Ils vont les goudronner, ce sera sympa ! Remarque Criquette sans y penser vraiment.Tu sais quoi pépé ?
- Ben non, je ne suis pas devin...
- Le mois prochain, pour mon anniv', j'ai... Oh... tu ne devineras jamais !
- Eh non, je ne suis pas prophète !
- Écoute bien : j'ai la permission d'aller danser en boîte de nuit et de mettre une jolie robe de demoiselle, j'suis trop contente !
- Oh, tu sais les boîtes et les boutiques, ça s'ouvre, ça ferme, ça ouvre à nouveau, les rideaux de fer sont faits pour ça... Ça n'est pas mal non plus de danser chez soi, en chemise de nuit...
- Pépé! Tu charries trop là ! s'exclame l'adolescente en faisant mine de dénouer les rubans du feutre. Et puis j'ai enfin droit au maquillage ! Tu verras, je vais dégoter un beau gloss à faire pâlir les roses !
- Jolie comme tu es, ça ne m'étonne pas ma Criquette ! Er même si on ne voit que tes yeux, tu vas faire des ravages !
- … Tais-toi, pépé, on croirait que tu veux me bâillonner !
- Non, non, pas du tout, moi je ne veux rien de tel... Au fait, à quel moment fais-tu tes courses alimentaires ?
- Ben... Comme tout le monde, en rentrant, en fin de journée, pourquoi ?
- Je me disais que tu pourrais les faire pendant ta pause de midi... Tu sais avant dix neuf heures, en automne, il fait sombre dans les rues...
Criquette vient se planter devant Monsieur Armand et le regarde intensément, mi surprise, mi rieuse .
- Eh ! Pépé !... Tu ne vas tout de même pas aller jusqu'à me parler de restrictions et de couvre-feu ! Oh là ! On est en 2018 et non en 1941, la guerre est ter-mi-née, pépé !
- Tss tss... On ne sait jamais à quel genre de guerre on peut avoir à faire... Profite bien de la vie ma Criquette ! Allez viens, on va le dénicher ensemble le beau gosse qui fera pâlir les roses !
Criquette s'étrangle de rire
- Pépé ! C'est un "beau gloss" que je dois trouver, pas un "beau gosse" !
- On ne sait jamais, l'un n'empêche pas l'autre ma Criquette ! Ai confiance en la vie et... en ton pépé !

 

 

 

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