Défi n°72 "Lettre d'amour délirante" proposé par Fanfan pour les croqueurs de mots.
" Vous écrivez une lettre d'amour délirante ou romantique à votre boucher, boulanger, facteur, crèmier. Dans cette lettre vous introduisez quatorze mots (dans l'ordre de préférence) de la chanson "Ne me quitte pas"."
Voici les mots: oublier, s'enfuit, malentendus, coeur, couvrir, domaine, amour, mort, feu, blé, rouge, ombre, chien, quitte.
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Mon tendre chou frisé,
Ail, ail, ail...mon Fiacre*, comment oublier le temps vernal où j'étais sous ton charme, sur un petit nuage de guimauve?
Que reste-t-il lorsque le souvenir s'enfuit?A cette pensée ma vue se brouille, je n'ai pourtant pas récemment pelé d'oignons. Et buis, (non non je ne suis pas enrhubée, bourquoi?) malgré les seaux de bleuet casse lunettes que j'avale en tisane, pour remplacer mes lentilles égarées, j'ai de la buée sur le clavier. Aussi, pour qu'il n'y ait pas de malentendus je voudrais graver en mon coeur ta force de beau cèdre, le mauve de ton oeil* lavande en amande, ton nez en patate, ta tignasse aux épis carotte, et ton labié cerise.
Prends bien soin de toi, tu es précieux pour moi comme le sont pour toi tes asperges, n'oublie pas de les couvrir d'un paillis. La serre est ton domaine, tu y as pignon sur rue. Avec amour tu dorlotes rutabagas et panais. Tu te fais du souci pour les endives qui deviennent frileuses sans leur édredon de jambon et pour les pommes que tu redoutes de retrouver en compote...
Ce serait la mort dans l'âme que je te verrais faire autant de bouleau pour des nèfles alors que tu n'as déjà plus un radis. On te dit en manque d'oseille et même sur la paille. Laitue? Serait-il pensable que tu me menthe(s)?
Le feu aux joues je me souviens de notre rocambolesque, voire carambolesque escapade dans le coing de ce champ de blé doré et rouge pomme d'amour, à l'ombre d'un grand chêne qui sentait le chien mouillé et le bouillon blanc. Ah, à cette datte, je me prenais alors pour la reine des prés...Ah ce qu'on navet riz! (et pas rhizome, croyez moi!)
Houx! ce fut une explosion de grenade, un coup de bambou, pire que si j'avais reçu une châtaigne ou même une giroflée à cinq branches, lorsque mon avocat, qui ne mâche pas ses mots, me bassina,
- Vous perdez la ciboule! Cessez de pêcher avec cet hêtre et ne lui tressez plus de couronnes de laurier en l'estimant bon comme la romaine...il serait préférable qu'il vous quitte. Sous ses airs angéliques, il cache un coeur d'artichaut et a pris le melon gros comme une pastèque depuis qu'il en pince pour Bella Done, cette grande liane au thym fusain. Et son dernier livre à la noix! Un naveton. C'est à croire qu'il a le bulbe en pois chiche.
Je n'étais pas mûre pour un tel discours, je me suis retrouvée blette comme une poire. Bien heureusement je n'ai pas longtemps végété en dormance,
- Mildiou! Vous m'importunez*, vieille bardane! Vos propos sont bettes et méchants.
...Il en est resté blanc-oïdium!
Hors de question que ce volubile ternisse notre romance. Comme je ne suis pas bêcheuse, je considère son discours comme caduc et te propose une romantique réconciliation sous le gui...
Ton affectionnée Pimprenelle.
* Fiacre, St Patron des jardiniers.
* Euh... il est de profil.
* En langage des fleurs, offrir de la bardane = "vous m'importunez".