Défi n° 243, proposé par Colette pour Les Croqueurs de Mots.

Publié le par François & Marie

Lipogramme  A.
                             ( Écrire un texte sans "a")

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C'est l'hiver.
Du côté de ce rustique lieu-dit de bergers et d'éleveurs, tout est neige.
Neige sur les buissons givrés.
Neige sur les fils électriques où l'été les hirondelles pépient, ordonnées comme épingles pour linge.
Neige sur l'herbe
roidie de gel.
Neige sur une route endormie, vierge de tous sillons.
Hors hiver des flopées de voiturées de toutes sortes y circulent; des bœufs enjougués tirent mollement jusque vers une scierie les lourds troncs des chênes; les douces juments véhiculent les édifices sensibles des meules de foin et de fines pouliches font giguer de légers tilbury.
Sur ce chemin, deux engins se meuvent d'eux- mêmes: une Citroën -deux- équidés, celle du médecin et une torpédo poussive, complice rococo d'un vieux British exilé.

Un soleil décoloré noie ce silence nivéen.
Rien ne bouge.
Subitement des corneilles s'envolent et fulminent
: des échos juvéniles et joyeux venus de l'horizon ont perturbé leur réunion, une troupe de mouflets - libre d'école le jeudi - se précipite en joyeuses turbulences sur le réservoir gelé que les grenouilles ont déserté.
Schliiii- criiiisss... en circonvolutions compliquées, les fers de leurs croquenots de bois griffent cette couche figée.
Friii Friii Friiiiii...!  Les fortiches enchevêtrent leurs surnoms; les sciures givrées des DD, GG
, PP, giclent jusque sur deux peureux restés sur berge, les humectent copieusement. Ils couinent. On les hue. Ils hésitent. Se concertent. On les oublie. Ils se précipitent, l'œil fielleux, s'embrouillent les brodequins, trébuchent, se prennent une pelle. On rit. Ils se retiennent de pleurer. Ils geignent, ouille, leurs genoux nus sont brûlés de froid. On se moque de ces empotés.


Vexés ils vont dissimuler leur moue lippue derrière une butte, pour fomenter une riposte. Bientôt ils pilonnent leurs ennemis de boules de neige cruellement bien serrées.
Les concurrents ripostent illico.
On lutte. On se retrouve le cou en rigole de froid-neigeux, le nez en compote et les lunettes boiteuses.
Puis, essoufflés et toussoteux, les oreilles coquelicot, les compétiteurs stoppent les hostilités, redeviennent compères et s'en retournent vers l'essentiel, le glissoire.
Les intrépides fusent en oblique "... 'tention ! Porthos ! Ses potes et leurs mousquets !" crie une buée de leur souffle. Vivement ils glissent vers les filles et, rudement, les dépouillent de leurs fichus.
Les donzelles trépignent de rogne, fondent sur leurs tourmenteurs et volent prestement leurs bérets - peu soucieuses de les délester d'une poignée de cheveux.
On se bouscule, on rit, on se houspille, on pleurniche - oh juste deux petits hoquets - et on replonge en mêlée.
Lorsqu'une robuste sonorité couvre le tohu-bohu - c'est le clocher qui répète "il est midi " - tout ce petit monde s'étonne et regrette que le temps file si vite.
Il est temps de rentrer chez soi.
Une ultime singerie, une dernière petite pique et on file vers son logis, trouver le réconfort d'une bonne soupe, possiblement précédée d'une mornifle - qui dégrise promptement - motif : lunettes bistournées.

« Rhooo, bin... quelle touche elles ont... Surtout que c'en est des qui sont presque toutes neuves ! Not' cousine Yèyette les eut portées seulement depuis un lustre; le verre droit est juste fêlé léger et griffuré des ronciers, oh trois fois rien. Et toi, tu les bousilles en un rien d' temps; t'es un drôle de gonze l' Dédé, moi j' dis. Et pis l' Lonlon qui bigle, y compte d' sus l' jour d' communion solennelle pour bien voir c' qu'on lui dit, qu' i' dit. Rhooo, bin mon fieu ! C'est ton problème, tu t' débrouilles, tu  r' joins les deux bouts en Stcoch... Scoch... en BIDULE qui coince, quoi ! ››


Dès le début de la semonce, l' Dédé se bricole un humble profil et devient tout étriqué.
« Rhooo, pis dis don'... R' dresse toi voir...  Rhooo, montre voir... c' que j' vois... Ton... ton...TON TRICOT... C'est' i çui qu'on conserve propre QUE pour une veille du lundi ? Viens voir montrer, que j' te dis. Rhooo, eh bin ! Bougrement voui, c'est lui ! Rhooo, et pis qu'il est tout embu, rhooo et pis tout vrillé, rhooo ! Pourquoi qu' tu l'eus mis un jeudi ? Hein ? Commère - moi voir pour voir...››
L'infortuné Dédé se trouve tout honteux, pris entre deux feux.
Nicole, première née, devine que c'est pour Simone - celle qui porte un si joli fichu bleu - que Dédé est coquet. Il veut qu'elle le repère, qu'elle s' intéresse à lui comme lui se préoccupe d'elle.
En cette moitié de vingtième siècle, cette mère ignore que son fils de neuf printemps puisse éprouver des sentiments, pour une jeune conscrite ...
D'ici presque deux siècles, des juniors riront bien de cette bluette, lorsqu'ils oublieront de prévenir qu'ils vont skier, ne rentreront que mercredi, ignorent où ils seront hébergés et s'en moquent, et retrouveront leur groupe de copines - rencontrées hier - sur des pistes de glisse fictives et régentées.
Elles seront en tenues de ski - ville, chic, dernier cri.
Elles confieront que, trop dégoûtées du soleil et du site neigeux, trop en flemme pour bouger, trop emmiellées de tout, elles se sont empiffrées de documents soporifiques sur leur iPod.
Un des dossier " l'hiver du temps des très vioques" les terrorise encore.
Elles n'ont rien pigé. C'est un monde obscur, ténébreux et irréel. Elles en tremblent.
« C'est quoi un fichu ?  une soupe ?  une mornifle ? et une mère qui embrouille son fils pour un... bidule ...un... tricot ? Inouï, non ?  pourquoi un clocher ( c'est quoi, dis ?) impose-t- il de rentrer déjeuner ? et pourquoi se retrouver "en complète tribu" ? Grotesque, non ?
« J' suis trop vénère, Myrtille.››
« C'est une prise de tête c' truc... J' llucine ! ››
« Go ? Zoé ! ››
« Go Myrtille. Tout schuss !››

 


 

Publié dans Défis

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J
Pas de case commentaire pour le défi/lundi de Josette, je repasserai.... JB
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J
Quelle histoire ! une contrainte qui vous a bien inspirés sourires ! enfin pas tout à fait quand un gamin la rend chèvre sourires ....
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D
Sans un seul "A" je suis retombée en enfance, chaque mot, chaque image m'ont tendrement bercée. Merci pour tout ça. Bises amirales.
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Sans "A"ssionel je vous dis ! Marie a réussi à raconter une histoire si vivante qu'on en oublie la performance du lipogramme, le François en est admiratif ! Merci pour votre visite, cap'taine , bises de nous deux.
D
quelle histoire et pas d'a ... vous êtes doués tous les deux. J'ai découvert le mot névéen (inconnu) . Les temps changent. Aujourd'hui chez Afflelou deux paires pour le prix d'une. Quel délicieux récit ! Merci et bonne soirée
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C'est toujours un plaisir de rencontrer des mots nouveaux, la langue française est très riche et il faut la choyer. Tous ceux/celles qui écrivent lui rendent hommage. Merci à vous pour votre visite, amitiés des Cabardouche.
L
Que c'est beau et drôle ! Vous êtes vraiment doués, tous les deux ! Je me suis régalée et ...... que de souvenirs votre conte soulève, au passage ! Tout y est ! J'ai tout connu (sauf le patinage : inconnu au bataillon ???... des glissades, ça oui.... même sur l'herbe des versants d'une colline placardés de sévères "attention aux vipères !")... La fin est sublime !!! Ah chapeau, vraiment.... Réaction ahurie de mes petits enfants à l'évocation attendrie de mes souvenirs de gamine : "Mais Mimine, tu es du tps des dinosaures ?" Juré-craché : c'est vrai de vrai ! Bref, suis du tps des vioques , tps impossible à narrer, tant : "Mimine, GRAVE-LA ! c'est trop trop !.".. Bon, je radote... Bisous
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Quand c'est écrit avec le coeur ça ne peut être que joli, Marie avait envie de raconter des scènes de jadis, simples et gaies avec des frimousses coquelicot et des remontrances de parents bienveillants qui faisaient leur possible pour maintenir une maison en ordre. Nous n'avons pas connu les dinosaures mais nous avons de joyeux souvenirs à partager. Merci pour votre visite madame Luciole, bisous de nous deux.
C
Félicitations pour l'histoire sans A et contente de retrouver " les gamins" si bien croqués . Bonne journée
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M
Pour ce défi, ton prénom m'était interdit Christiane ! <br /> François a bien pallié l'absence de "a" en traduisant avec talent et grande justesse ce temps des glissades sur la mare aux canards ( et ses aléas...), en sabots ferrés, aux environs de1955.<br /> Il neige enfin sur mon sapin ! Je vous souhaite à tous d'en profiter. Bises des Cabardouche.
A
Une prise de tête très joliment et humoristiquement réussie, je m'en réjouis pour vous deux les rois de l'écrit et du dessin !!!!
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Oh les rois, c'est peut être un peu exagéré... Je peux témoigner que Marie a été très inspirée pour cette histoire qu'ont suivi naturellement les petits dessins . Merci pour votre amicale visite ABC.
C
Grand merci ! Un texte si long et aucun «A» !!! C'est vraiment super ! Bravo à vous deux pour tout !!! J'♥ beaucoup, beaucoup ! Bonne poursuite de ce lundi ! Bisous♥♥ en partage !
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Marie avait envie de raconter une belle histoire comme elle sait si bien le faire , avec A ou sans A ! <br /> Merci pour votre défi , Colette, bises amicales de nous deux.
J
Excellent , un grand bravo à vous deux pour ces scènes d'anthologie en mots et dessins .<br /> Bonne journée <br /> Bises
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Marie n'a pas son pareil pour décrire avec une finesse de détails réjouissants, les scènes du quotidien d'un temps naguère. Merci pour votre visite Jazzy, belle semaine à vous , bises de nous deux .
J
quelle histoire ! cette scène des années 50 est fabuleuse je m'y croyais et quelle chute avec Myrtille et Zoé... un sans faute pour vous deux ! (le dessin du gamin qui attend que "ça tombe" est d'un grand réalisme tout comme le rafistolage des lunette avec le sparadrap c'est du vécu !)<br /> Je sous souhaite une belle semaine plus ou moins enneigée<br /> Bises amicales autorisées
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Merci beaucoup Josette, l'histoire de Marie est très vivante, pleine de détails et de surprises ... On ne s'aperçoit même pas qu'il manque les A ! <br /> Les dessins sortent tout seul du crayon quand l'histoire est bonne. Belle semaine à vous Josette. Et quant à la neige, il se pourrait bien que des ptiots flocons fassent une apparition. Bises amicales de nous deux.
J
Vous avez bien bossé les Cabardouche, texte et dessins... ah oui chapeau, bon lundi Croqueurs, bises
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Quand Marie conte, elle ne compte pas ses heures de création ! Bises de nous deux.
Z
Excellent histoire pour ce défi . Merci à vous deux.<br /> Bises du lundi
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Je crois que Marie a écrit un article "sans 'A' ssionel " ! Merci pour votre visite, bonne journée à vous, bises de nous deux .