Défi n°166 (logo-rallye), mené par Lilou - Soleil pour Les Croqueurs de Mots.
Lilou-Soleil dit:
"Écrire un texte comportant des couples de mots dont l'un n'est pas le féminin de l'autre et vice-versa.
- carabin, carabine
- capucin, capucine
- pélerin, pèlerine
- chevalier, chevalière
- lézard, lézarde
- passereau, passerelle
- brochet, brochette
- loup, loupe
- canin, canine."
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Léonard est un lézard espiègle. Il muse et lézarde dans une lézarde du vieux muret moussu.
D'aucun pourrait croire qu'il s'y cache parce qu'il a peur du loup. Que nenni ! C'est pour y passer quiètement le monde alentour à la loupe.
Léonard voit tout.
Léonard sait tout.
Léonard est friand des manigances du genre humain.
Léonard est en planque Parc aux Cerfs, où jadis un roi eut des rendez-vous galants.
Léonard a découvert en ce lieu le manège du chevalier De Saint Glinglin: dissimulé sous la défroque dévote d'un Capucin, ce paladin feint une démarche de pélerin en route vers les lieux saints. En réalité, il se presse à la rencontre de Capucine, une jolie soubrette aux charmes à peine voilés d'une légère pélerine. Pour elle, il éprouve un émoi dé-li-ci-eux... Aujourd'hui il va lui offrir son cœur et une chevalière monogammée, en tourmaline rose qui purifie le foie. (En y réfléchissant, si la Sécu distribuait des pierres fines à chaque candidat à la cure de détox, son gouffre... mais, brisons là... nous dérapons hors sujet.)
Léonard tique. De courroux il gonfle deux fois son cou, gloup, gloup ! Pie bavarde lui a rapporté que Capucine en pince pour un carabin aux canines de brochet et au troublant sourire canin... Cette maligne mérite-t-elle cette tourmaline qui anime la lymphe et les hormones ? (Ça a l'air pas mal ce cyclosilicate, vais aller faire un tour au Lidl, voir s'il est en vente libre.)
Si Glinglin apprenait que sa Capucine fricote avec un étudiant en médecine, il les transformerait d'un coup d'épée en brochette ou pire... s'il usait de sa carabine...
Léonard frémit, surgit de sa fissure. En deux carapates et trois oscillations, hop, il grimpe en haut de la passerelle d'où il domine la situation.
Telle une Clarisse-capucine aux yeux baissés pudiquement, Capucine attend.
Capuchon de Capucin tressautant, Saint Glinglin arrive céans.
Aux aguets, sur le qui-vive, Léonard se concentre; s'il avait des babines il se les poulèchertait, il ne va pas en perdre une miette.
Mais... Holà ! Pourquoi tout à coup s'envole-t-il dans les nues ? Passe encore s'il était passereau, mais il s'estime d'une caste bien supérieure, morbleu, il est saurien et si les sauriens volaient, vertuchoux, ça se saurait !
- Hé là ! hèle-t-il haletant.
- Du calme bestiole à sang froid, ricane un petit duc aux aigrettes frémissantes qui serre dans ses serres un Léonard gigotant, tu es mon sauveur ! Tu vas faire mentir mes frangins, grand duc et moyen duc, ce matin, tout goguenards ils m'ont prédit:
- Eh moutard, pour ton premier jour de chasse, on parie que tu rentres bredouille, sans rien à étaler sur nos tartines de moutarde !
Pourquoi diable à cet instant Léonard eut-il la bizarre intuition que sa journée finirait mal ?...
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L'histoire pourrait se terminer ainsi.
Les critiques littéraires et nombre d'érudits évoqueraient la chaîne alimentaire, les réseaux trophiques, la biomasse et tout le tralala.
Pas énormément concernée, la ménagère de plus de septante ans conclurait: " Faut bien que tout le monde vive ma bonne dame..."
Bref, on se résignerait, on oublierait Léonard le lézard...
Sauf qu'autour de moi, après lecture, on a pris des mines de Carême (alors qu'on est censés allélouiater en cette période pentecôteuse).
On prétexte qu'on s'était attachés à ce p'tiot Léonard,qu' il aurait pu continuer à espionner les tourtereaux et nous tenir au courant des rebondissements (ça aurait même fait l'économie d'un "Voici" ou d'un "Gala"...)
Et puis on boude parce que, d'habitude, sur cette page les histoires se terminent plutôt bien et que ça dérange de changer les habitudes et gna et gnagna...
Pfiou !
Second scénario (je sais que vous vous souvenez - hum... c'est évident - que nous voguons au-dessus du Parc aux Cerfs):
Clap de début !
Un jeune cerf, sans harde, foule d'un sabot léger et décidé le territoire d'un très vieux cerf pas commode qui veille jalousement sur son troupeau de trente têtes.
Le culot du jeunot, qui vient faire son marché sous son nez, énerve très très fort le vieux brocard. Furax, il pousse un brame si tonitruant qu'il fait dresser les poils des bras du Glinglin et desserre les serres d'un petit duc un peu trouillard qui voltigeait par là.
Et... qui donc atterrit dans le giron de Capucine, qui en tombe illico raide amoureuse ? Notre petit Léonard, certes un tantinet estourbi mais sain et sauf !
Clap de fin !
Et voilà ! Contents ?
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