Défi n°151 ("Les sept péchés capitaux"), proposé par "Quai des rimes" pour les Croqueurs de mots.
Thème "Les sept péchés capitaux"
- Orgueil - Avarice - Envie - Colère - Luxure - Paresse - Gourmandise.
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Madeleine-Marie (esserehcép inversée) s'agenouille dans l'obscurité du confessionnal.
Elle grommelle.
- Et ça scie toujours autant les rotules.
Tchac ! Sursaut de Madeleine-Marie. Le moucharabieh de bois a frisé son bout du nez en claquant.
- ...Eh ! ... Bonjour jeune homme...
- "Mon Père". Vous devez m'appeler "mon Père".
- D'après ce que j'entraperçois, vous avez l'âge d'être mon petit-fils !
- C'est le rituel. Et puis ne me dites pas "bonjour" ... Ici, on fait dans l'intemporel, la formule consacrée est "bénissez-moi mon Père parce que j'ai péché".
-... On m'a toujours conseillé de dire bonjour aux gens. Et puis qu'est ce qui vous fait supposer que j'ai péché ?
- J'en suis certain. Si vous êtes là c'est pour vous repentir de vos fautes et en rechercher l'absolution. Je vous écoute ma fille.
- ("Ma fille "! glousse glousse !) Vous êtes bien prétentieux avec vos certitudes, à la frontière du péché d'orgueil.
- Oubliez mes péchés, revenons aux vôtres. Laissons de côté les véniels, attachons-nous aux capitaux.
- Prenez garde mon garçon Père, en vous attachant aux capitaux, vous tombez dans le piège de l'envie et si vous les conservez jalousement, dans celui de l'avarice...
- Sachez que je ne suis point pingre mais âme charitable.
- Fort bien ! Alors, filez-moi donc un de vos coussins joufflus, ça soulagera mes genoux et vous fera paraître moins paresseux.
- Paresseux ? Je ne vous permets pas...
- N'est-ce pas se conduire en indolent que de se réfugier dans le cocon lambrissé de ce confessionnal, de s'y pelotonner en affectant une attention condescendante miséricordieuse aux confidences chuchotées ? En réalité, la béatitude affichée, reins encoussinés et mains croisées sur un bedon rebondi (signe d'inclination à la gourmandise), traduit la paresse, mère de tous les vices... dont, la luxure ...
- Suffit ! Vous dépassez les bornes.
- Héhé, mais... vous voilà en colère ! Pour la peine, jeune homme vous réciterez une, non! deux, dizaines de chapelet. Quant à moi, en me faufilant dans cet isoloir, j'ignorais que vous y étiez célébrant. Depuis longtemps j'avais dans l'idée de revenir, officieusement, détailler cet habitacle clos dont il m'importait de démystifier l'atmosphère. Dans mon enfance j'avais obligation d'y énumérer d'insignifiantes forfaitures, laborieusement et anxieusement listées (bon sang comment en dénicher au moins trois... et si on en oublie.. est-ce qu'on va en Enfer ?). Après les avoir fébrilement crayonnées sur un minuscule carnet à spirales, aussi riquiqui que mes larcins, je devais les énumèrer dans ce tombeau vertical, sous l'œil inquisiteur de Caïen. J'en ai gardé une telle aversion que durant des décennies, lorsque j'estimais avoir transgressé les Lois du Ciel, plutôt que de pénétrer à nouveau dans ce sarcophage, j'ai décidé de traiter directement avec le Très Haut. J'ai eu confiance en Sa clémence, j'ai décrété qu'Il légitimait mon auto-absolution et m'autorisait à redémarrer en paix. Alleluia !
- ... Euh... Amen !
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